Le programme MOBIDIF : mobiliser et protéger la biodiversité dans les exploitations agricoles franciliennes

10 mai 2021ContactOlivier Renault

Le projet MOBIDIF vise à proposer aux agriculteurs franciliens des concepts et des retours d’expériences issus de projets passés ou en cours pour leur permettre de mettre en œuvre des pratiques mobilisant la biodiversité, tout en améliorant leurs performances socioéconomiques et environnementales.

L’agriculture francilienne occupe près de la moitié du territoire régional (environ 48 %), façonnant ostensiblement les paysages. La majorité des 4 800 exploitations agricoles sont engagées dans la production céréalière à haut rendement, principalement en blé.

Une biodiversité malmenée

Depuis l’après-guerre, nombre d’agriculteurs, encouragés par l’État et par les politiques agricoles communes (PAC) successives, se sont orientés vers des pratiques de plus en plus intensives, fondées sur une mécanisation croissante, sur l’accroissement de la taille des parcelles et sur une simplification des paysages due aux remembrements successifs. Cette intensification a entrainé la disparition de nombreuses mares et mouillères, bosquets, linéaires de haies, prairies permanentes, vergers, arbres isolés, etc. Une part importante des agriculteurs franciliens fait aussi grand usage des engrais chimiques et des pesticides de synthèse (insecticides, herbicides, fongicides, etc.) Ces produits agissent sur les cultures, mais ils affectent aussi les milieux naturels adjacents, ainsi que les espèces faunistiques et floristiques qu’ils hébergent. Aussi, depuis plusieurs années, les scientifiques constatent un déclin des espèces inféodées aux milieux agricoles ainsi qu’une homogénéisation des communautés d’espèces : petit à petit, les espèces spécialistes des milieux agricoles sont remplacées par des espèces généralistes, ubiquistes, que l’on retrouve dans tous les autres milieux, y compris en ville. Enfin, les productions agricoles à haut rendement ont aussi, çà et là, une influence négative sur la fertilité des sols, voire sur la structure des  sols eux-mêmes. Elles peuvent à ce titre générer ruissellements et inondations lors des épisodes pluvieux intenses.

Une volonté de changer de pratiques

Forts de ces constats, de nombreux agriculteurs s’engagent dans des pratiques plus vertueuses, s’appuyant sur la biodiversité présente dans les paysages agricoles, tout en la favorisant. Ils replantent des haies, recréent des mares, sèment des prairies fleuries, adoptent des modes de culture préservant les sols (non labour et semis sous couvert), ou réduisent voire arrêtent d’utiliser des produits chimiques de synthèse.
C’est dans l’optique d’accompagner ces tendances qu’a été imaginé le projet MOBIDIF (mobiliser la biodiversité pour atteindre la multi performance des exploitations agricoles en IDF), dont l’objectif principal est de proposer aux agriculteurs des clés leur permettant de favoriser la mise en place de systèmes mobilisant la biodiversité et les services qu’elle offre gratuitement pour accroître les performances de leurs productions.

Les thématiques abordées 

Si nombre d’agriculteurs sont conscients des limites de durabilité des agroécosystèmes trop spécialisés et simplifiés, ainsi que de la nécessité de modifier leurs itinéraires techniques, certains sont encore hésitants à se lancer dans la transformation de leurs méthodes en raison d’un manque d’expertise ou d’expérience. Le projet MOBIDIF vise à leur proposer des retours d’expériences d’autres agriculteurs, ainsi qu’un réseau d’échanges qui leur permettra de mieux appréhender la prise en compte de la biodiversité dans leurs pratiques culturales. Huit thématiques leur sont proposées :

  • La biodiversité cultivée et spontanée au service de la vigne
  • Les vergers-maraîchers
  • Arbres et élevages : les éleveurs franciliens face au mur climatique
  • Les couverts végétaux en agriculture biologique
  • Les infrastructures agro-écologiques
  • Les associations de cultures et de variétés
  • L’éco-pastoralisme
  • L’Agroforesterie et le climat, carbone et bois énergie

Ces thématiques encouragent le développement de pratiques diversifiées permettant de recréer une mosaïque d’habitats au sein des paysages agricoles, en développant ou en réintroduisant des infrastructures agro-écologiques (haies, bandes enherbées, fossés, mares, etc.), en plantant des arbres de rente au sein des cultures (agroforesterie), en encourageant la diversification des activités (maraîchage, viticulture ou polyculture-élevage) favorables aux insectes auxiliaires/pollinisateurs ainsi qu’à toutes les espèces qui s’en nourrissent (rapaces, chauves-souris, batraciens, etc.), ou encore en s’orientant vers une agriculture biologique, raisonnée ou de conservation, plus respectueuses de la vie des sols et de la biodiversité (rotations culturales, réduction du labour, semis sous couvert, associations culturales, etc.)

Trois modes de diffusion des connaissances

Le projet prévoit trois modalités d’implication et de restitution des résultats en direction des agriculteurs :

  • l’organisation de journées techniques mêlant apports scientifiques et retours d’expérience d’agriculteurs, portant sur les huit thématiques évoquées ci-dessus ;
  • la mise en place d’ateliers pratiques de re-conception d’itinéraires techniques, de systèmes de production, de paysages, et de méthodes de gestion des mélanges d’espèces et de variétés, permettant aux agriculteurs intéressés de mieux comprendre et de mieux se représenter les concepts évoqués lors de la première étape, d’identifier des leviers, des contraintes et des freins potentiels ;
  • une étape de capitalisation des connaissances sous forme de synthèses écrites et vidéo sur diverses plateformes ou à travers les réseaux des partenaires du projet, et plus largement en direction du grand public. A ce titre, l’Agence régionale de la biodiversité d’Ile-de-France produit un film et un guide destinés à mieux comprendre les relations entre pratiques agricoles et biodiversité.

L’une des particularités du projet MOBIDIF est de rassembler des acteurs variés, intervenant dans le domaine de l’agriculture, bien sûr (Agrof’île, le GAB-idf, l’association Terre de liens, le réseau CIVAM Campagnes vivantes), mais également dans plusieurs disciplines du domaine scientifique (sciences écologiques, sciences humaines et sociales, sciences éco-agronomiques : CESCO, LADYSS, INRAE) avec pour objectif de co-construire des pratiques agricoles favorables à la biodiversité et d’en mesurer les impacts de manière scientifique. L’intégration dans le projet de deux parcs naturels régionaux franciliens (le PNR du Gâtinais français et celui de la Haute Vallée de Chevreuse), territoires en lien direct avec des agriculteurs, investis dans la préservation du patrimoine naturel et propices à l’expérimentation, garantit un meilleure ancrage avec le terrain ainsi qu’une facilitation pour le recrutement d’agriculteurs intéressés dans le programme.

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