Milieux forestiers

Sommaire

Les forêts et boisements franciliens couvrent 24% des 12 000 km² de la région. Le milieu forestier est caractérisé par la présence dominante d’un couvert arboré sur une surface suffisamment étendue pour assurer la pérennité de l'écosystème typique de ce milieu : outre les arbres et arbustes, les sous-bois sont particulièrement accueillants pour les fougères, mousses et champignons qui y trouvent une atmosphère fraîche et ombragée nécessaire à leur développement.

En Île-de-France, on retrouve principalement des forêts de plaine dominées par les feuillus, notamment des chênaies (dominées par le Chêne sessile et le Chêne pédonculé) qui représentent près de 60 % de la forêt régionale. Les frênaies (dominées par le Frêne commun) aux atmosphères plus fraîches sont en seconde place (environ 10%). Les aulnaies et saulaies (dominées par l’Aulne glutineux et les saules) franchement humides sont plus rares et surtout présentes en fond de vallées. Les chênaies pubescentes (dominées par le Chêne pubescent en mélange parfois avec des pins) adaptées, quant à elles, au climat chaud et sec du Sud de la France, ont trouvé refuge dans les grands massifs forestiers et les coteaux calcaires du sud et de l’ouest de la région.

Plus que la seule strate arborée, la composition et la diversité de la strate herbacée composant le sous-bois sont souvent révélatrices des caractéristiques écologiques du milieu. Le détail de ces végétations est fourni dans le guide des groupements végétaux de la région parisienne (Bournérias et al., 2001) et dans le guide des végétations remarquables de la région Île-de-France (Fernez et al., 2015).

L’importance des milieux forestiers pour la biodiversité francilienne est incontestable puisqu’ils représentent 73 % des réservoirs de biodiversité identifiés dans le cadre du SRCE. Pas moins de 12,5% des forêts de la région sont identifiées en Zones naturelles d’intérêt écologique, faunistiue et floristique (ZNIEFF) de type 1. Cependant, dans le détail, les superficies forestières classées en Réserve Biologique Intégrale demeurent faibles : 1315 ha (dont 1067 ha au sein du massif de Fontainebleau) . Les Réserves Biologiques Dirigées, quant à elles, représentent 2803 ha. À ces deux dispositifs de protection viennent s’ajouter les îlots de vieillissement ( et de sénescence et, bien sûr, les sites Natura 2000.

Etat de santé

Les suivis réalisés par plusieurs centaines de naturalistes volontaires dans la région Île-de-France révèlent que la biodiversité des milieux forestiers sur les dix dernières années se porte mieux en comparaison aux milieux urbains et agricoles (Muratet, 2016). Une réponse sensible d’une protection juridique forte, d’une politique foncière de la région visant à conserver de grands massifs forestiers et d’une évolution de la gestion sylvicole plus écologique ! Il s’agit donc d’acquis essentiels à maintenir et à renforcer dans l’avenir notamment avec la concrétisation d’une trame forestière sur tout le territoire francilien pour répondre aux effets du changement climatique et de la fragmentation croissante des espaces boisés.

 

LES SPÉCIALISTES DES MILIEUX FORESTIERS

C’est en forêt que leur déclin est le moins marqué. D’après les états de santé 2016 de la biodiversité francilienne (Muratet, 2016), les oiseaux spécialistes ont décliné de 8 % en 11 ans (contre 17 % pour l’ensemble de l’avifaune en milieu forestier, ce qui pourrait témoigner d’une amélioration de la qualité écologique de ces habitats). Parmi ces spécialistes, on retrouve notamment les pics, certains rapaces ainsi que de nombreux passereaux tels que le Pouillot siffleur, le Bouvreuil pivoine, la Sittelle torchepot ou la Mésange nonnette. De vastes surfaces forestières sont nécessaires pour la nidification de rapaces tels que la Bondrée apivore ou, encore plus rares, le Circaëte Jean-le-Blanc et l’Autour des palombes. Des arbres vieillissants sont essentiels pour les pics. Si les pics noirs et mars sont en augmentation dans toute la région depuis plus de 20 ans, le Pic cendré en a quasiment disparu, et le dernier individu se trouvait cantonné dans une réserve intégrale de la forêt de Fontainebleau. Les milieux ouverts intra forestiers et les lisières sont particulièrement importants pour les oiseaux. Le reboisement des landes suite à l’arrêt du pâturage et la déprise générale des prairies font disparaître ces habitats et de nombreuses lisières forestières sont désormais abruptement interrompues par un champ, une route ou une ville.

L’herpétofaune est très représentée en milieu boisé : non seulement les amphibiens y passent l’hiver mais vont ensuite se reproduire pour certains dans les mares forestières, ornières et fossés. Les Grenouilles agiles, rousses et le Crapaud commun sont les espèces les plus visibles par leur migration précoce spectaculaire. Mais l’anoure le plus menacé des forêts franciliennes est certainement le Sonneur à ventre jaune, qui reste très localisé au nord-est de la Seine-et-Marne, où des petits noyaux de populations demeurent. Depuis 2014, ce petit crapaud fait l’objet de suivis intensifs afin de mieux connaitre l’état de ces populations qui ne dépassent probablement pas les quelques centaines d’individus.

Chez les urodèles, la Salamandre tachetée est probablement l’espèce la plus emblématique des milieux forestiers. Témoin de l’ancienneté des forêts, elle est très sensible à la fragmentation de ces milieux.

Certaines espèces de reptiles sont également inféodées aux milieux forestiers, comme le Lézard vivipare, ou à des habitats connexes tels que les prairies intra-forestières et les landes. On trouve par exemple dans ces dernières le Lézard des souches ou encore la Vipère péliade qui affectionne les milieux frais. Notons également la présence en Île-de-France de la Couleuvre d’Esculape, espèce arboricole d’affinité méditerranéenne que l’on peut rencontrer dans les haies, fourrés et lisières bien exposées.

Pour la plupart des mammifères de la région, les forêts représentent l’habitat principal. Ils peuvent s’y cacher mieux que n’importe où ailleurs, et ce milieu demeure le plus proche de ce à quoi ressemblait l’Île-de-France avant l’anthropisation et l’essor de l’agriculture. Du mulot sylvestre au Cerf, tous ont une caractéristique commune : ils savent se faire très discrets. Repérer leurs traces, poser un appareil photo à déclenchement automatique, permet d’en savoir beaucoup plus sur leurs habitudes.

A venir

A venir

GESTION SYLVICOLE

La « gestion » d’une forêt implique qu’elle soit altérée, en tant qu’habitat fonctionnel. Certaines ressemblent même plus à des champs d’arbres qu’à de vraies forêts : c’est le cas de nombreuses peupleraies et parcelles de résineux. On y trouvera nettement moins de biodiversité qu’au sein d’une forêt hétérogène. Certaines espèces animales et végétales tolèrent mal la régularité et la faible diversité de ce type de boisement.

Les futaies jardinées constituent l’un des modes de gestion forestier privilégié en Ile-de-France. Si elles bénéficient à certaines espèces, elles éloignent les forêts de leur niveau de naturalité et menace les espèces ombrophiles... Le rajeunissement du cycle d’exploitation des arbres compromet la survie de tout un cortège varié d’espèces inféodées aux forêts âgées comme les lichens, les champignons, les bryophytes, les insectes saproxyliques, les chiroptères etc. D’une manière générale, la simplification des milieux détruit nombre de niches écologiques et fragilise les chaines trophiques.

L’objectif de gestion en futaie irrégulière de l’ensemble des forêts publiques franciliennes peut permettre de concilier une certaine exploitation de la forêt tout en s’éloignant moins du niveau de naturalité ancestral. Le fait de vouloir maîtriser au maximum les perturbations naturelles pour ne pas avoir à en subir les conséquences (feux, chablis, pâturages de grands herbivores) nécessite de remplacer les actions de rajeunissement de certains milieux par une gestion adaptée. L’anticipation des changements climatiques, avec l’arrivée des stratégies de « migration assistée » consistant à semer des espèces plus thermophiles va ouvrir de nombreuses nouvelles questions.

FOIRE À QUESTIONS 

Quelle est la part de forêt publique et privée en Île de France ?

Les forêts franciliennes sont majoritairement des espaces privés (à 69%) et sont caractérisées par un morcellement foncier très important de leur surface puisqu’elles appartiennent à 148 000 propriétaires différents.

Quels dispositifs de protection existent en forêt ?

Il est très compliqué de modifier l’usage d’une forêt : toute autorisation de changement d’affectation des sols nécessite une autorisation de défrichement assortie de nécessité de planter des boisements compensatoires. Un document d’urbanisme peut également classer les boisements en Espaces Boisés Classés (EBC) ce qui rend encore plus difficile le changement d’affectation des sols.

Néanmoins, la disparition des forêts n’est pas la seule pression contre lesquels des outils de protection ont été conçus. La gestion forestière, selon les époques, les sensibilités, les besoins de la société, peut être plus ou moins défavorable à la biodiversité. En forêt publique, des dispositifs ont été conçus pour maintenir les forêts dans leur état de naturalité et y interdire toute forme d’exploitation. Il s’agit des réserves biologiques domaniales. Dans les réserves dites intégrales, toute intervention est proscrite, alors que les réserves biologiques dirigées visent généralement à maintenir des milieux ouverts ou humides en forêt. La politique d’Îlots de sénescence menée par l’ONF mais aussi dans le cadre de la forêt privée et des mesures de compensation permet de commencer à tisser un réseau entre ces réserves intégrales, pour l’instant essentiellement présentes dans les massifs de Rambouillet et de Fontainebleau. Les réserves naturelles et les arrêtés préfectoraux de protection de biotope constituent d’autres dispositifs règlementaires utilisés en Île-de-France pour protéger certains petits bouts de forêt.

Concilier exploitation forestière et biodiversité est un autre enjeu de taille. Le dispositif Natura 2000 tente d’y répondre, tant au sein des forêts publiques (tout ou partie des massifs de Fontainebleau et Rambouillet, par exemple) que privées (tout ou partie du massif de Villefermoy..).

Qu'en est-il à l'échelle nationale ?

Occupant 15,4 million d’hectares, soit 28% du territoire, la superficie de la forêt française augmente depuis la Révolution où elle était tombée à son plus bas : entre 6 et 7 millions d’hectares, soit 12% du territoire. L’arrêt du pâturage, la récolte de bois pour la papeterie, la construction et l’énergie représentent les principaux facteurs qui motivent le maintien et l'exploitation des forêts.